Indépendants, simulez votre rentabilité !
Chaque année, des milliers d’entreprises se créent, mais un pourcentage significatif échoue rapidement, souvent par manque d’analyse de marché, d’un business plan inadéquat ou une mauvaise gestion financière. Si vous envisagez de vous lancer en tant que graphiste, webdesigner, développeur, secrétaire ou dans tout autre domaine indépendant, et que vous vous demandez comment assurer la rentabilité de votre entreprise, vous êtes au bon endroit.
En bonus, à la fin de cet article, je vous présenterai un outil gratuit qui vous permettra de connaître la rentabilité de votre auto-entreprise.
La rentabilité, qu’est-ce que c’est ?
Lorsque vous êtes salarié, votre salaire arrive chaque mois. Vous pouvez ainsi calculer votre « reste à vivre » en déduisant vos charges fixes mensuelles (loyer, assurances, abonnements, factures d’énergie, prêts, etc.) et charges variables (nourriture, sorties, imprévus), en identifiant le seuil de charges fixes à ne pas dépasser. Votre équilibre financier est donc plus simple à prévoir, car vous êtes assuré de toucher le même revenu tous les mois
Pour un entrepreneur, il n’y a pas de revenu fixe, ce qui impose un calcul préalable afin de s’assurer de générer un chiffre d’affaires suffisant pour couvrir les frais généraux de l’entreprise. Par exemple, si votre activité consiste à changer des piles de montres ou à réaliser de petites réparations, vous devrez en faire beaucoup pour en tirer un revenu décent. Si le remplacement d’une pile coûte entre 10 et 34 €, et que vos charges mensuelles s’élèvent à 1 200 € (incluant un objectif de salaire), vous devrez atteindre un nombre de clients conséquent. La question à se poser : vos services ou produits sont-ils suffisamment valorisés pour couvrir vos charges et dégager un revenu ?
Réfléchir à votre rentabilité, c’est penser à la pérennité de votre entreprise
Assurer la rentabilité de son entreprise implique de prendre en compte chaque charge fixe, chaque charge variable, d’analyser la concurrence et de comprendre le marché.
Sans cette vue d’ensemble, vous risquez de fixer des tarifs trop bas (sous-évaluant votre travail) ou trop élevés, nuisant ainsi à l’attractivité de vos services. Une gestion financière mal planifiée peut rapidement déstabiliser la santé de votre entreprise.
Les coûts de votre entreprise : les charges fixes et variables
Pour définir le prix de vos services, commencez par additionner vos coûts fixes et variables. Bien que chaque entreprise ait des spécificités, les coûts se divisent généralement en deux catégories principales :
Les coûts fixes
Les coûts fixes sont des charges régulières, indépendantes du nombre de projets, et qui doivent être payées chaque mois. Exemples de coûts fixes :
- Loyer : Que vous travailliez dans un local ou chez vous, intégrez le coût du loyer.
- Logiciels et abonnements : En tant que graphiste, vous pourriez avoir besoin d’une licence Adobe, ou d’autres logiciels professionnels.
- Assurances professionnelles : Selon votre métier, des assurances peuvent être obligatoires selon les secteurs d’activité (comme la responsabilité civile pour éviter les litiges).
- Assurance santé et prévoyance : En tant qu’indépendant, souscrire à une mutuelle et à une prévoyance pour garantir un revenu en cas d’arrêt de travail est essentiel.
- Charges de personnel : Si vous embauchez, ces charges doivent être payées chaque mois, quel que soit le niveau d’activité.
- Comptabilité : Si vous êtes au régime réel, un expert-comptable est souvent obligatoire.
Les coûts variables
Les coûts variables dépendent de l’activité et du volume de projets :
- Cotisations et impôts : Que vous soyez auto-entrepreneur ou sous un autre statut, vous paierez des cotisations sociales (URSSAF) en fonction de votre chiffre d’affaires.
- CFE (Cotisation Foncière des Entreprises) : Calculée en fonction de votre chiffre d’affaires et du taux de votre commune, cette taxe est payable chaque année.
- Coûts de production : Selon votre activité, des frais de déplacement, de matériel ou de fournitures spécifiques peuvent s’ajouter.
- Sous-traitance et collaboration : Le coût de ces prestations doit être pris en compte.
Comment calculer le TJM (Taux Journalier Moyen) ?
est un conseil courant dans les groupes de freelances lorsqu’on cherche à déterminer combien facturer une prestation. Le TJM est le tarif par jour de travail. Pour le calculer, utilisez la formule suivante :
TJM= (Total des charges annuelles + Revenu souhaité) / Nombre de jours facturables
Ramener ce tarif au tarif horaire (en le divisant par 8) permet de fixer le coût horaire de votre travail.
Il vous suffira de déterminer combien de temps vous prendra la tache à accomplir dans votre journée. A partir de ce calcul, vous pourrez donc déterminer le prix de votre prestation et la comparer avec le marché et vos concurrents afin de vous assurer de votre rentabilité.
Cependant, selon votre activité, le TJM peut être complètement différent, et cet aspect reste souvent flou pour les clients. Les métiers créatifs suscitent souvent l’incompréhension : le client ne réalise pas toujours le temps de travail nécessaire.
Par exemple, un site web ne se construit pas en un jour, “tout comme un logo ne se conçoit pas en 10 minutes. Il est généralement plus facile pour un client de payer quelque chose de “tangible”. Ainsi, il n’est pas rare d’entendre “C’est cher !” lorsqu’un graphiste propose un logo à 600 ou 700 €.
Il est également important de comprendre qu’un prestataire de services aura souvent un TJM plus élevé parce qu’il facture moins de jours par mois.
En moyenne, un indépendant consacre environ 10 jours par mois au travail facturable. C’est pour cette raison que les TJM très bas pour des prestations de webdesign ou de logo chez certains prestataires français posent question : soit le travail est effectué trop rapidement (au détriment de la qualité), soit le TJM est mal calculé, mettant en danger la pérennité de l’entreprise.
Exemple de Luc, graphiste :
Luc, auto-entrepreneur et graphiste à domicile, doit payer des charges fixes chaque mois : abonnement Adobe, internet, téléphonie, assurances, prévoyance et frais bancaires, pour un total annuel estimé à 6 000 €. Il souhaite se verser un salaire net de 30 000 € par an, soit 2 500 € par mois. Il doit également s’acquitter de cotisations sociales (22 %) et de la CFE, estimée à 500 € par an.
Pour couvrir ces charges et obtenir son revenu net, Luc doit générer un chiffre d’affaires minimum de 36 500 € hors cotisations sociales, soit 46 794 € en incluant celles-ci. En supposant qu’il facture en moyenne 120 jours par an, son TJM est donc :
46 794 / 120 = 389 € / jours soit 48€/heure.
Ainsi, pour pouvoir payer ses charges et se verser le salaire souhaité, Luc devra facturer environ 48 € de l’heure ou 389 € par jour à ses clients. Dans ce cas, l’indépendant choisit souvent d’arrondir son tarif à la centaine la plus proche pour dégager une marge supplémentaire ou pour valoriser son expertise.
Exemple de Tom, nettoyeur de voitures à domicile :
Tom, qui nettoie des voitures, n’a pas de local à louer, mais doit couvrir ses assurances, frais de santé, frais bancaires (1 000 € par an) et CFE (800 € par an). Ses charges fixes annuelles s’élèvent donc à 1 800 €.
Son activité implique davantage de frais variables, notamment pour l’eau, l’électricité, les produits et le matériel, estimés à 2 400 € par an.
En visant lui aussi un revenu net de 30 000 € et en cotisant à 22 %, Tom devra générer un chiffre d’affaires minimum de 34 200 € avant cotisations sociales, soit 43 846 € brut.
Comme il travaille tous les jours ouvrés et peut accueillir plusieurs clients par jour, son TJM est : 43 846 / 200 = 219 € soit un tarif horaire de 27€
Pour un objectif de salaire équivalent, le TJM de Luc est donc plus élevé, car il travaille moins de jours par an et consacre davantage de temps à la prospection. Il est donc essentiel de calculer et de comprendre son TJM pour assurer la rentabilité de son activité.
Calculer son point mort
Aussi appelé seuil de rentabilité, le point mort est un indicateur crucial permettant de savoir à partir de quel moment votre entreprise commence à générer des bénéfices, c’est-à-dire lorsque toutes vos charges sont couvertes.
Pour calculer le point mort, il est essentiel de connaître le taux de marge bénéficiaire, qui se calcule comme suit :
Taux de marge bénéficiaire = (bénéfices net / Chiffre d affaires réalisé) * 100
En reprenant le profil de Luc, graphiste indépendant, le calcul est le suivant :
(30 000 / 47000)*100 = 64%
Le calcul du point mort est ensuite le suivant : charges fixes / taux de marge bénéficiaire, soit : 5000/0.64 = 7831 €
Cela signifie que Luc devra réaliser un chiffre d’affaires de 7 831 € pour couvrir ses charges fixes, soit 650 € par mois, avant de commencer à générer des bénéfices. Au-delà de ce montant, il devient bénéficiaire.
Soyez prévoyants !
Nous avons couvert les bases des coûts de votre entreprise, les éléments minimaux à prendre en compte pour éviter les problèmes de trésorerie. Cependant, n’oubliez pas qu’en tant qu’auto-entrepreneur, vous ne bénéficiez pas des mêmes protections qu’un salarié. Il est donc crucial d’anticiper certains aspects essentiels.
La retraite
Il n’est plus un secret que votre retraite dépend directement de vos cotisations. En auto-entreprise, avec un taux de cotisation de 22 %, vos droits à la retraite seront limités. Le calcul exact dépendra de votre affiliation (URSSAF ou CIPAV). D’après une simulation réalisée avec l’outil de la CIPAV pour cet article, un chiffre d’affaires de 40 000 € par an pourrait vous donner droit à environ 1 219 € brut par mois.
On trouve une estimation globale de la retraite d’un entrepreneur autour de 50 % du chiffre d’affaires moyen, soit un montant similaire à celui du simulateur de la CIPAV. N’hésitez pas à faire une simulation avec vos propres revenus.
Pour assurer votre retraite, il est donc essentiel d’intégrer une épargne régulière dans vos charges fixes, via un PER, des placements boursiers ou encore un compte à terme.
L’épargne
Vous êtes entrepreneur, et au fil de l’année, vous traverserez des périodes fastes mais aussi des périodes creuses. La situation économique peut également influencer la santé de votre entreprise. Au-delà de la préparation de votre retraite, épargner une partie des revenus de votre entreprise peut vous permettre de faire face aux mois plus calmes, comme l’été, ou à une baisse d’activité imprévue.
Il est souvent recommandé de constituer une épargne couvrant au minimum trois mois de frais fixes afin de ne pas combler ses dettes avec ses fonds propres.
Cependant, avec la conjoncture actuelle, il est conseillé d’épargner autant que possible pour renforcer votre sécurité financière. Avoir six mois, voire un an de frais fixes d’avance peut sembler ambitieux, mais cela vous apportera un confort non négligeable en cas de coup dur.
La prévoyance
Dans vos charges fixes, la prévoyance est également indispensable pour garantir votre revenu en cas d’arrêt maladie ou d’accident. Avec des cotisations de 22 %, les indemnités journalières de la sécurté sociale sont limitées.
En observant une carence de 3 jours en cas d’arrêt maladie de plus de 7 jours ou d’hospitalisation, la sécurité sociale verse 1/730e du chiffre d’affaires moyen annuel sur les 3 dernières années.
Par exemple, pour Luc, avec un chiffre d’affaires moyen de 28 000 € sur les trois dernières années, après un abattement de 34 % (car il est en BNC), on obtient un revenu moyen de 18 480 €. Divisé par 730, cela donne une indemnité de :
18480/730 = 25€ par jour
En cas d’arrêt de travail, Luc toucherait donc environ 750 € par mois par la sécurité sociale, il peut couvrir ses frais fixes mais c’est bien en deçà de son salaire habituel de 2 333 €.
En souscrivant une prévoyance, il pourrait sécuriser un minimum de revenu en cas de maladie.
Vérifiez les délais de carence et les conditions de prise en charge de votre contrat qui peuvent différer d’un assureur à un autre.
Quel outil pour calculer son seuil de rentabilité ?
Maintenant que vous comprenez l’importance de calculer la rentabilité, quel outil pouvez-vous utiliser pour faire votre prévisionnel ?
Julien Clément, connu pour son projet Kob-One, a développé Krizalid, un outil de calcul de rentabilité pour freelance simple et gratuit pour aider les indépendants à estimer leur point mort.
Cet outil vous permet de simuler le nombre de projets nécessaires pour être rentable et de visualiser vos prévisions financières rapidement.
Conclusion : Maîtrisez vos dépenses !
Vous l’aurez compris, la rentabilité est la base de toute entreprise pérenne. Une entreprise doit avoir une vision complète de ses coûts. Anticipez le volume d’activité, réévaluez votre TJM chaque année, ainsi vous pourrez gérer votre activité sereinement. En tant que chef d’entreprise, l’épargne et la gestion proactive de vos charges sont essentielles pour sécuriser votre avenir entrepreneurial.
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